|
|
|
Institut Européen
du Marketing Direct |
|
Institut d’Administration
des Entreprises |
|
|
|
|
|
|
Magistère de Marketing Direct
Mémoire de fin d’études
E-fluents
et
Marketing viral ?
Ingrid BARBEY
Master 2 de
Marketing Direct
Le 28 février
2006
I. Qu’est-ce
que le Marketing viral ?
A. Bouche
à oreille vs Marketing Viral
D. Le
marketing viral : Définitions.
A. Historique
du leader en marketing
C. Le
leader sur Internet : Qui est-il ? Quelles sont ses spécificités ?
a) Le
profil socio-démographique selon Vernette.
b) Valeurs
et attitudes du leader selon Vernette.
c) Attitude
et usage de l’Internet par le leader selon Vernette.
d) Les
différents types d’e-influents selon Burson-Marsteller et Ropers Starch
Worldwide.
e) Formule
A.C.T.I.V.E. de Rosen.
f) Concepts
dérivés du leadership d'opinion
d) Leader :
un double pouvoir, deux types de réseaux.
III. Mesures
et Identification du leader en marketing viral.
B. Méthodes
d’identifications.
IV. Quelle
utilisation des leaders ?
B. La
création d’un plan média s’appuyant sur les e-fluents
A. La
présence de communautés.
B. Marketing
viral « exponentiel ».
C. Caractéristiques
des communautés.
a) Communautés
ouvertes ou fermées.
b) Groupes
de liens communs et d’identité commune.
c) Les
communautés virtuelles de consommateurs et les communautés créées par les
entreprises.
D. Exemple
de création d’une communauté virtuelle :
Le cas « New Balance »
b) Un
cas incontournable : le Projet Blair Witch.
a) Des
experts en marketing s’achètent les services de jeunes blogueurs américains.
c) Lycos
ou l’échec de la stratégie du spam anti-spam.
Dans
l’économie traditionnelle, on considère qu’un individu peut influencer le
comportement d’achat de deux autres consommateurs. À l’inverse, une
insatisfaction peut provoquer la contamination de huit de ses proches… Sur le
Web, un client acquis à un produit en parle à huit personnes. Huit personnes
susceptibles d’en convertir huit autres…
De nouveaux réflexes sont désormais
acquis pour les clients : confronter l’information officielle de la marque
avec ce qu’on en dit sur la toile.
L’hégémonie
du média TV a vécu. Il devient de plus en plus complexe de maîtriser le
message. Tout le monde peut publier. Et nous nous connectons tous les uns aux
autres. L’opinion des communautés Internet s’impose comme une alternative à la
presse consumériste. 10% de la population en ligne, approximativement 11 millions
d’utilisateurs à ce jour seraient des e-fluents, plus couramment appelés leader
d’opinion.
L'intérêt porté par le marketing au leadership d'opinion provient des résultats des recherches conduites par les sociologues dans les années 50 aux États-Unis. Celles-ci montraient comment les leaders, davantage exposés aux médias, traitaient et répercutaient sur leur entourage les informations reçues (Katz et Lazarfeld, 1955). Le leader est une source d'information privilégiée dans le cadre des communications interpersonnelles, du type "bouche-à-oreille" : ses avis sont spontanément sollicités par son entourage immédiat (amis, collègues, voisines, relations sociales, etc.) avant ou après l'achat d'un produit ou un service (Dichter, 1966 ; Montgomerry et Silk, 1971 ; Newman et Staelin, 1973).
Depuis peu, les publicitaires redécouvrent la puissance des effets de ces communications interpersonnelles, en construisant une forme spécifique de stratégie d’influence, appelée « Buzz marketing » (Stambouli et Briones, 2002).
Aujourd’hui, les sociétés ont un intérêt croissant à susciter du buzz parmi les leaders d’opinion, qu’on les appelle « connecteurs » comme Seth Godin ou « sneezers » comme Emmanuel Rosen. En effet il est bien plus pertinent et plus économique de laisser ces derniers porter la bonne parole au sein de leur réseau que de dépenser des millions en communication de masse.
Qui sont ces influenceurs ? Comment les approcher ? Le marketing des influenceurs est-il entré dans les mœurs des annonceurs ?
Après avoir étudié le marketing viral dans son ensemble, nous nous intéresserons au profil et à l’approche des influents. Enfin nous analyserons quelques exemples de réussites ou d’échec de campagnes en marketing viral.
I. Qu’est-ce que le Marketing viral ?
A. Bouche à oreille vs Marketing Viral
Depuis
de nombreuses années, les responsables marketing ont pris en compte et cherché
à exploiter les phénomènes de bouche à oreille permettant de promouvoir une
marque ou une offre commerciale. De nombreux acteurs ont largement profité du
phénomène sous ses formes spontanées ou rémunérées. Les systèmes de parrainage
mis en place par les clubs de livres ou de disques constituent ainsi depuis
longtemps une forme de bouche à oreille ou de recommandation récompensée.
Dès lors, pourquoi remplacer le terme de bouche à oreille par celui de marketing viral ?
L’expression est apparue en 1997 pour qualifier la stratégie du site
Hotmail. Le marketing viral est en fait le
bouche-à-oreille à l’âge du virtuel.
Une simple explication de texte permet de comprendre l’évolution des termes employés.
L’usage du
terme marketing sous-entend une démarche marketing volontariste qui vise à
provoquer ou amplifier les phénomènes de recommandation alors que dans le
« vieux monde » du bouche-à-oreille, l’essentiel des phénomènes non
rémunérés se déroule sans intervention directe ou contrôle d’un responsable
marketing.
Quant à lui,
l’adjectif viral sert à décrire le phénomène de propagation qui, notamment sur
Internet, se caractérise par un système de diffusion pyramidal et une vitesse
de transmission qui rappellent évidemment le mode de transmission d’une
épidémie.
Le marketing viral se distingue donc en simple théorie d’un phénomène classique de bouche à oreille par son ampleur et par sa vitesse de propagation.
Dans
le domaine de l’explication de texte, on peut noter que, paradoxalement, le
terme de « bouche-à-oreille électronique » qui est souvent utilisé
comme synonyme du marketing viral repose en fait sur une technique qui ne fait
quasiment pas appel au sens auditif et qui repose essentiellement sur un
processus de communication écrite à travers les échanges d’email, les forums ou
les sites Web.
Il
existe de nombreux termes, surtout en langue anglaise, qui passent pour
synonymes du terme marketing viral : buzz marketing, marketing exponentiel,
marketing organique, referral marketing, self-propagation marketing, word of
mouth marketing et certains puristes expliquent que la diffusion large d’un
message sur le Net n’est pas pour autant du marketing viral même si elle relève
d’une « contamination interpersonnelle » par le bouche-à-oreille.
Le terme de buzz marketing, au niveau francophone, est trop souvent considéré comme un synonyme du marketing viral. Le livre « Buzz Marketing » de Karim Stamboli et Eric Briones sorti en 2002 n’a fait qu’amplifier le phénomène. Cependant, les phénomènes de buzz ne sont qu’une technique parmi d’autres du marketing viral qui vise le plus souvent à créer une rumeur ou un bruit de fond médiatique avant la sortie d’un produit, d’un film ou d’un service. La traduction du terme « Buzz » qui signifie « bourdonnement » confirme d’ailleurs bien cette idée d’un bruit ou d’un son annonciateur. Ces campagnes peuvent parfois durer plusieurs mois avant l’événement ou la sortie du produit. Un des exemples les plus célèbres de campagnes de buzz marketing est celui relatif au lancement du film Blair Witch Project.
Le bouche à email a ses limites. Je pense notamment à la rumeur, un phénomène insaisissable. Il ne faut pas perdre de vue qu'il existe un bouche-à-oreille naturel et que les consommateurs s'informent par d'autres moyens. Ce qui distingue la rumeur du bouche à email, c'est que dans le cas de la rumeur, ceux qui la lancent ne la contrôlent plus. Il faut donc prendre toutes les précautions possibles, d'autant plus que le penchant traditionnel du bouche à email est plutôt l'information négative que positive.
D. Le marketing viral : Définitions.
Pour
Jason Chervokas, par exemple, « le marketing viral n’est pas qu’une simple
traduction de “bouche-à-oreille” à l’âge digital ». Il n’est de marketing viral
que si « le recrutement de nouveaux utilisateurs ajoute de la valeur et de
l’utilité à l’expérience du service dans sa totalité ».
Si
l’on reprend là la « vieille idée » de la loi de Metcalfe et de la théorie des
« externalités de réseau » formulée par Katz et Shapiro « la valeur et
l’utilité d’un réseau de personnes sont directement facteurs du nombre de
personnes connectées à ce réseau », le marketing viral n’est vraiment « pur »
que s’il permet de maximiser la satisfaction d’un internaute en intégrant le
maximum d’individus à son propre réseau. Ce phénomène est particulièrement bien
illustré par des outils de messagerie instantanée comme ICQ ou AOL Instant
Messenger (« mes amis doivent être équipés du même service pour que je puisse
communiquer avec eux ») ou encore par des sites d’achats groupés où le prix
d’un produit est d’autant plus favorablement négocié que le nombre d’acheteurs
est important.
Cette
seconde définition a l’avantage de souligner les vrais bénéfices dus à la
nature du réseau et liés à l’économie virtuelle. Mais elle est encore trop
restrictive.
Le
principe associé au mécanisme viral, est de faire de chaque client un «
ambassadeur » du site ou de l’événement et une source privilégiée de nouveaux
clients pour l’entreprise : « L’idée de base ? Etre si cool (sic) que
l’entreprise n’a même pas à faire son propre marketing elle-même. »
Aucune
définition ne s’étant encore véritablement imposée, nous dirons que le
marketing viral est une technique de marketing sur Internet qui pousse les
sites ou les utilisateurs à faire circuler un message vers d’autres sites ou
d’autres utilisateurs et qui permet, à terme, une croissance exponentielle de
la visibilité et de l’efficacité de ce message.
Le marketing viral est entretenu par :
o
Les
actions de communication hors ligne permettent d’augmenter la visibilité du
site ;
o
La
création d’une relation avec les fans du site qui passe par le renouvellement
du contenu avec de nouvelles « pièces à conviction » chaque jour ;
o
Le
nombre de liens hypertextes réorientant l’internaute vers le site ;
o
La
récupération du succès du site par les médias traditionnels.
De nombreux événements, faits ou chiffres viennent illustrer l’importance que peuvent prendre les phénomènes viraux sur internet. Ces différents éléments ne permettent pas tout de même d’affirmer qu’une campagne de marketing viral est forcément couronnée de succès.
Des études ont trouvé que l’acheteur en ligne faisait part en moyenne à 12 personnes de son entourage de son expérience d’achat alors que le chiffre n’est que de 8,6 pour un film ou 6 pour un restaurant apprécié. Une étude Benchmark Group de 1999 estimait que 24% des acheteurs sur un site déclaraient être venus par un phénomène de bouche à oreille.
Différents facteurs contribuent à expliquer la puissance constatée du marketing viral :
En effet, le coût marginal très faible voire nul d’envoi d’un message électronique ou d’une contribution sur un forum joue un rôle très important dans l’ampleur du phénomène. Ce caractère négligeable du coût d’envoi d’un message ou d’une recommandation favorise les actions de l’individu, mais également la mise en place de modules spécifiques du coût de l’entreprise.
Les fonctions classiques des logiciels de messagerie (répondre, transmettre, carnet d’adresses, …) évitent de ressaisir l’information et réduisent l’effort nécessaire à la propagation de l’information.
Le
lien hypertexte joue également un rôle facilitateur mais cette fois, du côté du
destinataire d’une recommandation. Que ce soit dans le corps d’un e-mail ou sur
une page Web, le lien hypertexte permet de se rendre sans effort et
immédiatement sur la page ou le contenu faisant l’objet d’une recommandation.
Non seulement la transmission du message se fait à moindre coût et sans effort, mais en plus, elle est instantanée. Dans le cas de campagnes basées sur l’humour, le fait de voir quasiment immédiatement son collègue de bureau rire en visualisant une vidéo que l’on vient d’envoyer, augmente le « plaisir de la transmission ».
La diffusion de l’information prend souvent une forme pyramidale, chaque personne avertie en informe à son tour plusieurs et le phénomène s’accélère lorsque les informations sont diffusées sur des listes de destinataires de la messagerie, sur des listes de discussion ou des forums à forte audience.
Il est fréquent que des journalistes spécialisés dans un domaine soient membres de listes de diffusion pour assurer une certaine forme de veille informationnelle. Après vérification des sources et de l’information, le marketing viral peut étendre ses effets et provoquer une couverture médiatique par la presse spécialisée, qu’elle soit en ligne ou traditionnelle. Les reprises peuvent également se faire sur des titres ou émissions grand public. Il est maintenant presque de tradition que des vidéos Internet particulièrement réussies et drôles finissent par être diffusées à la télévision lors d’émissions de grande audience.
Internet est un environnement anxiogène ou beaucoup d’individus éprouvent des craintes liées à la sécurité des paiements, à l’identité du vendeur, au respect des délais, voir même, au fait d’être réellement livré. Dans un tel contexte la recommandation d’un tiers prend d’autant plus de valeur et devient encore plus importante que dans le commerce traditionnel.
« Marketing viral » ne rime pas toujours avec réussite. En effet, il existe des risques qui doivent être présents à l’esprit lors de la réflexion sur un projet de campagne.
En effet, l’un des risques majeurs se trouve dans le fait qu’un message publicitaire peut être modifié, dénaturé ou détourné par des internautes qui la plupart du temps font cela soit pour s’amuser soit pour causer du tort à une entreprise et/ou à un produit. La déformation peut être parfois involontaire mais tout aussi désastreuse. Il est possible d’essayer de limiter les risques pour une campagne virale.
Un des moyens est de proposer des messages pré-rédigés aux internautes, cela leur facilite la tâche de relais mais permet également de contrôler le contenu transmis. Il n’y a cependant pas de solution miracle et un internaute motivé pourra toujours déformer le message initial.
Lorsque la campagne prévoit de récompenser les internautes se faisant le relais du message ou de l’offre de la marque par des incitations financières ou en nature, il y a de grands risques que quelques internautes se livrent à des pratiques abusives. Des internautes vont par exemple spammer un grand nombre de boîte e-mails ou polluer des forums de discussion pour conquérir des filleuls rémunérateurs. Les personnes gênées par ces pratiques risquent alors de se retourner vers la marque ou d’être nettement moins bien disposées à son égard. Dans les cas extrêmes la presse peut même se faire l’écho des abus.
La parade la plus simple est d’annoncer clairement aux candidats à la recommandation que le gain potentiel est limité, la tentation de l’abus est ainsi réduite.
Une campagne peut finalement s’avérer parfois catastrophique pour cause d’un succès prenant des proportions non prévues. Le risque est surtout présent lorsque l’offre est particulièrement séduisante car c’est dans ce cas que le viral risque de marcher et que les personnes alertées par des connaissances risque d’adhérer à l’offre. Les demandes ne pourront alors pas être toutes satisfaites ce qui sera préjudiciable pour le compte de l’entreprise.
Dans ce cas, l’entreprise doit se protéger en signalant que l’offre est limitée en fonction des disponibilités.
Pour les auteurs Seth Godin (« Unleashing the Ideavirus ») et Emmanuel Rosen (« The Anatomy of Buzz »), ceux qui propagent le virus sont des célébrités, les acteurs proéminents d’une industrie autant que les gens ordinaires qui connaissent beaucoup de monde et passent le mot.
A. Historique du leader en marketing
L’intérêt suscité par les leaders d’opinion résulte des recherches en sociologie menées dans les années 50 aux États-Unis, pour expliquer comment une information se diffuse au sein d’une population. L’objectif était de comprendre quelle était l’influence exercée par l’entourage d’un individu sur son vote. Les résultats montraient que les leaders, davantage exposés aux médias, traitent et répercutent sur leur entourage les informations reçues. Ce processus de communication en deux temps a été formalisé dans un modèle dénommé “two step flow”. Un second modèle, appelé « interactions multiples », postule une influence interactive, par échange et dialogue multiple entre le leader et son entourage.(cf. schéma ci-dessous).
Le marketing s’est intéressé aux leaders, dès qu’il a été montré que le leader constitue une source d’information privilégiée dans le cadre des communications interpersonnelles, du type “bouche à oreille”. Les avis des leaders sont recherchés par les acheteurs potentiels lors de l’achat de nouveaux produits et, d’une manière générale, pour les produits dont l’achat présente un caractère impliquant. Les jugements du leader sont plus crédibles qu’une publicité, parce que considérés comme impartiaux et émanant d’un expert de la catégorie de produit concernée.
Plus récemment, la théorie des réseaux sociaux a renouvelé l’intérêt du concept de leadership, en montrant l’influence de certains individus, appelés leaders ou influenceurs, au sein d’un groupe.
L’influence des leaders dépend de leur degré de centralité dans le groupe et de la force des liens qui existent entre les membres. Un réseau se caractérise par la multi appartenance des individus à des groupes, d’où des influences multiples.
Dans une perspective voisine, l’approche post-moderne insiste sur le lien entre l’individu et le groupe, matérialisé par la consommation d’objet ou d’une marque. On assiste à une influence grandissante des jugements du groupe sur les choix individuels de consommation. Le lien affiché par l’objet devient plus important que le bien lui-même. L’individu recherche une nouvelle forme de relation avec les autres, plus sélective et plus profonde, fondée sur une identification réciproque.
Bien qu’un leader ne soit pas forcément un innovateur, ses opinions sur les produits et les marques sont acceptées et se diffusent au sein des “tribus” correspondant à sa zone d’attraction. Les jugements du leader sont naturellement imités par son entourage, car ils représentent une forme d’adhésion aux normes du groupe, un prix à payer pour être intégré dans le réseau relationnel.
Plusieurs
auteurs ont apporté une définition au leader d’opinion.
Ainsi, King et Summers (1970) définissent un leader comme une personne ayant "La capacité à donner des informations sur un sujet et le fait d'être sollicité par son entourage sur ce sujet".
Quant à eux, Reynolds et Wells (1977) voient "Une personne qui influence de manière informelle le comportement d'autres personnes dans une direction souhaitée".
Pour Ben Miled et Le Louarn (1994) cela
"suppose une communication interpersonnelle qui se traduit par un échange
d'informations entre les individus, mais également par une certaine influence
personnelle du leader sur les attitudes et les comportements"
Mowen (1995) le
définit comme "Une personne qui fournit plus souvent des informations que
les autres. Un consommateur qui influence les décisions d'achat des
autres"
Pour Engel, Blackwell et Miniard (1995) c’est une "Personne crédible auprès de laquelle un consommateur s'enquiert de conseils pour des biens et services " "Un transmetteur d'opinions sur les biens et services "
Flynn, Reinecke, Goldsmith et Eastman (1996) proposent la définition suivante : "Un individu qui cherche à influencer le comportement d'achat d'autres consommateurs dans une catégorie de produit spécifique"
Un dernier exemple, celui de Sheth, Mittal et Newman (1999) est : "Donneur d'informations et de conseils qui conduisent le receveur de l'opinion à accepter la position conseillée".
En résumé, selon ces diverses définitions, on peut voir que les deux mots que l’on retrouve le plus souvent autour du leader d’opinion sont influence et informations.
C. Le leader sur Internet : Qui est-il ? Quelles sont ses spécificités ?
Reste
à connaître les éventuelles particularités du profil du leader d’opinion
Internet.
a) Le profil socio-démographique selon Vernette.
Pour détecter
l’existence de différences, Vernette a retenu le principe des indices
d’affinité, mesure courante en média-planning. Ils se calculent en faisant le
rapport entre le pourcentage de la modalité (i) d’une caractéristique
socio-démographique (j) obtenu dans le segment des leaders (le “TOP 10")
et le pourcentage de cette même modalité dans la population. Après avoir
multiplié par 100 ce rapport, on observe les modalités des variables qui sont
sur-indicées (indice>100) ou sous-indicées (indice<100).
Par rapport au
reste de la population française, le leader Internet est un homme relativement
jeune (de 15 à 34 ans). C’est un étudiant ou un cadre (supérieur, profession
intellectuelle ou intermédiaire). Son pouvoir d’achat est plus élevé que la
moyenne de la population française. Cependant si les hommes l’emportent
largement, près d’un leader sur trois (32,5%) est une femme.
Concernant l’âge, la tranche 15-24 ans est largement sur-pondérée, suivie par celle des 25-34 ans. La barrière des 50 ans exclut pratiquement les individus du groupe des leaders.
Bien que les étudiants représentent plus du quart des leaders, les cadres et les professions intellectuelles supérieures sont les plus fortement surpondérés. Les professions intermédiaires viennent en troisième position. Les employés représentent que 11% des leaders tout comme les ouvriers. Cependant la démocratisation de l’Internet conduit à un tassement progressif du pouvoir discriminatoire de la catégorie socioprofessionnelle.
(cf. schéma ci-dessous).
b) Valeurs et attitudes du leader selon Vernette.
Les leaders Internet se différencient par la recherche de valeurs liées au plaisir, l’amitié authentique, une existence passionnante et le respect de soi. Le différentiel est particulièrement marqué sur les items liés à l’hédonisme. Par exemple, « voyager pour découvrir de nouveaux horizons », « vivre ses passions à fond » ou encore « être avec de bons amis ’ ’ ’ »(cf. tableau ci-dessous).
Le leader a un esprit ouvert et une vision mondiale de la société, conforme aux valeurs d’origine de l’Internet : il se sent nettement plus citoyen et européen que le reste de la population.
c) Attitude et usage de l’Internet par le leader selon Vernette.
L’attitude du leader vis-à-vis de l’Internet est extrêmement favorable. Pour lui, ce n’est pas trop compliqué, ni inutile. Il favorise la vie quotidienne, permet une meilleure communication et offre de nouvelles perspectives professionnelles. Les leaders perçoivent peu de risques liés à l’Internet car ils sont familiers et maîtrise le produit. Il est tout de même bon de noter que plus de la moitié d’entre eux jugent ce média coûteux.
Le leader pratique intensément les outils du Web, c’est un très fort sur-consommateur du réseau.
d) Les différents types d’e-influents selon Burson-Marsteller et Ropers Starch Worldwide.
Ces consultants en communication ont étudié le profil de ces individus. Ils les ont baptisés les « e-fluentials », des multiplicateurs d’opinion de différents types.
Il y a par exemple le « Communicateur », qui reçoit et envoie deux fois plus de e-mails que la moyenne des internautes.
L’ »Eponge » est celui qui absorbe une quantité d’informations et les répercute. Le « Fan » de technologie fonctionne comme un expert d’Internet, scotché au réseau plus de deux heures par jour.
Enfin, le « Découvreur » est un maniaque qui essaye tout ce qui sort sur le marché et en parle.
e) Formule A.C.T.I.V.E. de Rosen.
Emmanuel Rosen a très bien synthétisé les caractéristiques d’un « network hubs » sous la formule A.C.T.I.V.E. :
Adeptes précurseurs : ils ne sont pas les premiers adeptes (trend makers) mais sont précurseurs sur les membres de leur réseau
Connectés : connectés à plusieurs sous groupes dans leur communauté d’influence, ils servent de passerelle entre l’information externe et ses groupes
Travellers : ils voyagent (physiquement ou virtuellement) plus que les autres.
Informés : toujours en quête d’information et de faits chiffrés
Vocaux : ils s’expriment plus et plus fort à propos d’un produit que les autres
Exposés aux médias : ils consultent plus et avec plus d’attention les médias de masses mais s’ils n’en font pas moins confiance à leurs amis.
f) Concepts dérivés du leadership d'opinion
On
peut observer qu’il existe des concepts dérivés du leader.
Ainsi, le gate-keeper ou "portier" est l'individu qui introduit ou freine le changement à l'intérieur du groupe : "il a la capacité de décider si les autres membres du groupe reçoivent ou pas l'information" (Aassel 1983) ". Or, comme le note Ladwein (1999, p. 130), le statut de portier n'a d'intérêt que si ce dernier dispose d'une expertise minimale qui lui confère une impartialité, source d'une autorité naturelle au sein de son cercle : le statut de "portier" est alors voisin, sinon identique à celui de leader d'opinion.
Le market-maven (Feick et Price, 1987) est "un individu qui détient des informations au sujet de toutes sortes de produits, de lieux d'achats et d'autres éléments concernant les marchés, qui initie les discussions avec les consommateurs et répond à leur demande". Pour Mowen (1993, p. 495), leur influence serait plus large que celle des leaders, leur expertise s'étendant "au marché en général". Bien que Feick et Price (1987) montrent une corrélation faible (de l'ordre de .22) entre le leader et le market maven, mais l'essence conceptuelle de ce dernier nous semble présenter de nombreux points communs avec celle du leadership.
L'utilisateur leader est un consommateur expert et familier avec la nouveauté dans un secteur particulier, capable d'anticiper les évolutions des attentes et des besoins des autres et d'impulser l'adoption et la diffusion des produits nouveaux (Von Hippel, 1986 ; Beji Becheur et Pras, 2001). Cependant, force est de constater que cette définition est très proche de celle donnée par Rogers (1983) pour les adopteurs précoces d'une innovation : or selon ce dernier, les adopteurs précoces sont essentiellement des leaders d'opinion dans la catégorie de produits.
Dans le processus de diffusion
d'une innovation, le leader intervient après les innovateurs ; il détient la
clé du succès futur du nouveau produit (Rogers, 1983). Plus le produit est
perçu comme complexe ou risqué, plus les jugements du leader sont sollicités
(Wilkie, 1986).
Certains auteurs ont cherché à savoir si l’influence s'exerçait de nature homophile ou hétérophile.
Certains voient une influence horizontale fondée sur le principe d'homophilie, c'est-à-dire de similarité entre pairs : on influence plus facilement ceux qui se sentent proches de soi et qui appartiennent au même milieu social (Montgomerry et Silk, 1971 ; Busch et Wilson, 1976 ; Rogers et Bhowmik, 1971).
D'autres font l'hypothèse inverse : l'influence serait verticale, du haut de l'échelle sociale vers le bas (King, 1969).
Le courant actuel va dans le sens d'une
influence plutôt homophile, mais selon Johnson Brown et Reigen (1987) tout
dépendrait de la nature de la force des liens sociaux existants dans le groupe
: des liens faibles entre les membres
d'un même groupe permettraient un passage des informations entre des
groupes différents, ce qui favoriserait une diffusion de type hétérophile,
alors que des liens forts favorisent la circulation des informations au sein
d'un groupe homophile. En dépit des progrès réalisés par ces recherches,
plusieurs points méritent encore des éclaircissements. Trois questions nous
semblent cruciales :
Reste à savoir quelle est l’étendue couverte par l’influence du leader.
L’influence
du leader pourrait s'étendre à un assez grand nombre de catégories de produits
différentes, car le fait de posséder tel ou tel trait de personnalité amènerait
à être plus souvent leader dans un plus grand nombre de catégorie de produits,
à compétence technique équivalente.
En
revanche, si le leadership n'est pas relié à un trait de personnalité, rien ne
permet de penser que l'on puisse être leader dans beaucoup de catégories de
produits, et dans ce cas, l'expertise et le leadership devraient être fortement
corrélés.
Enfin, il
est possible que la catégorie de produit ait un effet modérateur sur le poids
respectif des dimensions. Par exemple, certains produits ont une visibilité
sociale marquée (vins, alcool, parfum, luxe, mode...), alors que pour d'autres,
les attributs fonctionnels l'emportent (électroménager, bricolage,
entretien..).
Dans le
premier cas, l'influence sociale interviendrait, sans qu'il existe
nécessairement un partage d'informations, par effet d'imitation ; dans le
second, la facette de communication l'emporterait.
Enfin,
pour les produits expérientiels (article de sport, musique, spectacle,
voyages), on peut imaginer que le leader mobilise de manière égale les deux
composantes : le partage d'expériences conduit à de nombreuses discussions avec son entourage, tout en développant une
expertise dans la classe de produit.
Est-ce que les caractéristiques des
leaders varient selon la culture ?
Le poids et l'influence des leaders
pourraient être plus fort dans les pays à forte tradition orale (Moyen-Orient,
Afrique) et réciproquement. De même, l'existence ou l'absence de hiérarchies
sociales pourrait favoriser une influence de type hétérophile. La nature de
l'expertise et la sociabilité des leaders sont les variables pour lesquelles la
culture a un rôle fortement discriminant.
d) Leader : un double pouvoir, deux types de réseaux.
En somme, le leader exerce, plus ou moins à son insu, un double pouvoir : un pouvoir de compétence conféré par son expertise perçue dans une ou plusieurs catégories de produits, mais aussi un pouvoir de référence qui entraîne une volonté d'identification et d'imitation de la part de son entourage. Adopter les jugements du leader s'est s'identifier à lui et (ou) être reconnu comme faisant partie de son cercle (Ladwein, 1999).
Ben Miled et Le Louarn (1994) arrivent à une conclusion très proche en considérant que le phénomène de leadership mobilise deux types de réseaux qui ne se recouvrent pas forcément : un réseau social qui influence prioritairement les consommateurs sensibles à la conformité (Bearden et al. 1989) et un réseau de transfert d'informations, notamment dans les cas de dissonance du consommateur après un achat majeur (Gatignon et Roberston, 1985). Cette double visibilité devrait se traduire par des sollicitations plus fréquentes, consécutives à la reconnaissance d'une expertise minimale dans une catégorie de produits. Il existe donc, à la fois une inégalité dans la quantité d'information transférée et une capacité naturelle d'influence sur l'entourage.
III. Mesures et Identification du leader en marketing viral.
Pour initier ce phénomène de communication qu’est le marketing viral, la marque se doit tout d’abord d’identifier les personnes capables de véhiculer le message vers les bonnes cibles. Selon la stratégie souhaitée, ces leaders d’opinion seront des présidents d’association étudiante, des webmasters de site ou encore des responsables informatique au sein de certaines structures. Tel est le rôle du ciblage.
Afin d’atteindre cette clientèle, quelques trucs simples : être large en échantillons et en rabais, offrir un cadeau à ceux qui amènent de nouveaux clients, publier les avis de consommateurs satisfaits sur le site. Et surtout distribuer le produit le plus largement possible. Microsoft a par exemple offert 450 000 milles copies de Windows 95 avant même que le logiciel ne soit sur le marché.
Godin applique à la lettre ces principes à sa promotion personnelle. Sur son site ideavirus.com, il a mis à disposition le contenu de son manifeste avant que le livre n’arrive en librairie. Et il encourage les visiteurs à s’approprier le texte et à l’envoyer à des amis.
Savoir identifier le leader d’opinion d’une population précise n’est pas toujours chose facile mais la récompense est grande pour les quelques sociétés qui y parviennent. La typologie de ces autorités est très diverse et va bien au-delà des stars ou des faiseurs de tendances les plus médiatiques. Un enfant populaire dans sa cours de récréation qui lance la mode des Pokemon, un cadre supérieur qui vante les mérites de son Palm Pilot ou la ménagère ses tupperwares à ses amies,... les leaders d’opinions sont tout autour de nous.
Dans son livre, Emmanuel Rosen définit un « network hub » comme une personne qui « transmet une opinion sur un certain produit à plus de gens que la moyenne ». Attention, tous les fans d’une marque, les consommateurs satisfaits, … n’en sont pas pour autant automatiquement des leaders d’opinions. En effet Emmanuel Rosen nous explique que « les sociétés font souvent l’erreur de conclure qu’un client n’a pas grand-chose à voir avec leur importance dans les réseaux sociaux ».
Cette
technique suppose l’établissement de normes.
La popularité
de la courbe de diffusion d’une innovation pourrait s’expliquer en partie par
le fait que Rogers (1983) stipule une forme et une distribution des scores
permettant de qualifier les différents segments de consommateurs (innovateurs,
récepteurs précoces, etc.). Le développement de normes pose de réels problèmes
au chercheur : échantillons représentatifs de taille importante avec
des échelles sont souvent lourdes à
administrer, voire difficiles à comprendre pour certains répondants.
Des travaux de Vernette et Schmutz, en 2000, ont permis d’évaluer la distribution des scores de leadership dans 27 catégories de produits et services, sur la base d’un échantillon par quota composé de 10 000 répondants représentatifs de la population française âgée de plus de 15 ans. L’échelle retenue s’appuie sur la version française de Childers (1986) qui a été validée par Ben Miled et Le Louarn (1994) avec 5 questions et 5 échelons, mais la formulation de type Likert a été remplacée par des supports sémantiques pour une meilleure compréhension par les répondants. Les moyennes sont présentées dans le tableau ci-dessous.
La « grande moyenne » (ou moyenne des scores moyens de leadership) est égale à 11,7 points, avec un écart type de 1,18.
Scores moyens de leadership dans la
population française
Catégories de produits |
Scores moyens |
Catégories de produits |
Scores moyens |
Électroménager |
11,7 |
Maroquinerie et accessoires |
10,2 |
Ameublement, décoration |
12,5 |
Produits pour enfants |
11,2 |
Bricolage |
12,6 |
Boissons sans alcool |
11,1 |
Jardinage |
12,5 |
Vins, champagne, alcools |
11,9 |
Automobile |
12,5 |
Bières |
10,6 |
Hifi, photo, vidéo |
11,8 |
Alimentation |
14,4 |
Micro-informatique |
11 |
Produits d'entretien (lessives,...) |
11 |
Internet |
10,1 |
Magasins, grandes surfaces |
12,8 |
Téléphonie |
11,4 |
Voyages, vacances |
13,8 |
Parfums, soins pour homme |
10,3 |
Banques (placements, crédits...) |
10,8 |
Parfums, soins pour femme |
11 |
Émissions de télévision |
13,9 |
Maquillage |
10 |
Magazines, quotidiens |
12,7 |
Mode, habillement homme |
10,9 |
Émissions de radio |
12,1 |
Mode, habillement femme |
11,5 |
|
|
Source :
Vernette et Schmutz, (2000).
Pour distinguer, dans une population donnée, un individu « leader d’opinion » d’un autre, il faut fixer un score minimal sur l’échelle. L’analyse des différentes distributions des scores de leadership selon les catégories de produit montrent que la plupart ne s’écartent pas trop d’une loi normale. Par analogie avec la courbe de diffusion d’une innovation de Rogers (1983), on peut identifier une zone de leadership pour tout individu qui obtient un score au moins supérieur à la moyenne plus une fois l’écart type, soit les 16% supérieurs de la distribution. Deux bornes courantes en statistique descriptive sont retenues comme seuils : le premier décile, les leaders TOP 10 et quartile, les leaders TOP 25. Les résultats reproduits dans la figure ci-dessous montrent que la grande majorité des premiers déciles est compris entre 17 et 19 points et aux alentours de 14 et 15 points pour les premiers quartiles.
Source : Vernette et Schmutz,
(2000).
B. Méthodes d’identifications.
Il existe trois méthodes d’identification du leadership d’opinion selon Vernette.
o
Sociométrique.
Les répondants citent nominativement les personnes auprès desquelles ils prennent conseil. Par exemple, une étude menée aux USA sur 20 000 médecins généralistes et spécialistes a montré que chaque médecin prend en moyenne des avis techniques auprès de 5 confrères et des conseils amicaux auprès de 3 autres confrères (Collins, Hawks et Davis, 2000). Cette méthode fonctionne bien en marketing industriel (eg. Leonard-Barton, 1985), car les populations mères sont réduites. Mais elle est difficilement applicable pour les produits de grande consommation, la taille des cibles étant souvent trop importante.
o
Informateur
clé.
Pratiquée en ethnographie et en psychosociologie, la méthode se base sur l'observation participante : un observateur (membre du groupe) désigne la ou les personnes qui jouent le rôle de leader. Cette approche fonctionne bien pour des recherches organisationnelles (force de vente, acheteur industriel, etc), mais elle est difficilement adaptable pour des études marketing de grande consommation
Cependant l'expérience de
Mancuso (1969) menée dans plusieurs collèges aux Etats-Unis montre qu'il est
possible d'utiliser cette méthode pour le lancement de nouveaux produits. Un
panel de leaders pour des titres de musique rock a été constitué : ceux-ci ont
constitué dans un premier temps leur propre hit-parade. Quelques temps après,
tous les titres sélectionnés ont atteint les dix premières places dans les
villes-tests, sans aucune autre forme de communication média.
o
Auto-désignation.
Les répondants évaluent eux-mêmes leur influence dans une catégorie de produits ou de services, à l'aide d'une série de questions standardisées. L'utilisation des échelles permet d'identifier dans une population, en fonction du score enregistré, les leaders d'opinion. Quatre échelles existent (King et Summers, 1970 ; Childers, 1986 ; Goldsmith et Desborde, 1991 ; Ben Miled et Le Louarn, 1994 ; Flynn et al. 1996).
Cette dernière méthode présente les qualités opérationnelles nécessaires à son utilisation dans le cadre d'applications et de recherches marketing.
IV. Quelle utilisation des leaders ?
Selon
Vernette, un annonceur, une agence de publicité ou une centrale d’achat
retireront un double avantage en centrant leur communication sur les leaders
d’opinion :
une démultiplication d’audience à budget identique. Passionné par le produit ou service, le leader aime discuter de ces sujets avec son entourage. Il recherche et aime les publicités, nécessaires pour son information sur les produits. La cible marketing interroge avant (ou après) l’achat le leader. Avant l’achat, les jugements du leader sur les marques forgent les croyances de l’entourage ; après l’achat, ils contribuent à la satisfaction (ou insatisfaction) du client.
Les avis du leader sont reconnus comme qualifiés. Ses conseils sont
suivis, parce que désintéressés et impartiaux. Grâce aux nombreuses
discussions, le leader connaît les croyances et les critères de choix de son
entourage. Une marque valorisée par le leader accroît plus aisément ses scores
d’agrément sur la cible ; à l’inverse, une marque mal évaluée, risque
d’être rapidement rejetée par son entourage.
Les
débats théoriques précédents ne sont pas sans incidences pour les applications
managériales. Par exemple, si le fait d’être leader d’opinion relève du trait
de personnalité, l’influence devrait être commune à plusieurs catégories de
produits, ce qui faciliterait le ciblage des leaders. Or nous avons vu que les
résultats des recherches contradictoires. Pour certaines, les leaders
d’opinions présentent des traits de personnalité communs, tels que le fait de
se sentir différent des autres, la volonté d’agir différemment, l’ouverture
d’esprit, la créativité et la curiosité d’esprit, la confiance et l’estime de
soi. D’autres relient le trait de caractère « force de personnalité »
avec le leadership, mais au prix d’une altération du concept. Au total peu de
liens ont été validés entre le leadership d’opinion et les traits de
personnalité. En revanche, les caractéristiques sociales semblent plus
distinctives : les leaders sont socialement mieux intégrés, disposent
d’une aisance relationnelle et sont plus actifs.
S’il
existe peu de traits de personnalité communs aux leaders, les managers doivent
raisonner par catégorie de produits. En effet, les résultats de Vernette et
Schmutz (2000), fortement convergents avec ceux de King et Summers (1970),
montrent que seulement 16% des français sont des leaders (TOP 10) dans plus de
4 catégories. Par ailleurs, 40% de la population n’est leader aucune des 27
catégories de produits, ce qui confère une bonne validité discriminante au
seuil de premier décile, puisque avec un tirage aléatoire, la probabilité de
n’être leader dans aucune des 27 TOP 10 est égale à (0,9)27, soit 5,8%. Le
manageur marketing doit valider le profil spécifique d’une cible composée de
leaders, dès qu’il change de catégorie de produit. En revanche, quelle que soit
la catégorie, le leader est durablement impliqué par le produit.
B. La création d’un plan média s’appuyant sur les e-fluents
Comment construire un plan média ciblé sur les leaders d’opinion ?
Plusieurs recherches montrent que les
leaders sont plus exposés aux médias que les non leaders (Chen et Misra, 1990 ; Sheth et al. 1999).
Les informations échangées au cours des communications interpersonnelles ont un
impact plus fort sur le comportement d'achat que celles données dans une
publicité (Herr, Kardes et Kim, 1991). Les avis du leader sont perçus comme
qualifiés et ses conseils sont suivis, parce que jugés désintéressés et
impartiaux. Avant l'achat, les jugements du leader sur les marques forgent les
croyances de l'entourage ; après, ils contribuent à la satisfaction (ou à
l'insatisfaction) du client. Une marque valorisée par le leader accroît plus
aisément ses scores d'agrément sur la cible ; à l'inverse, une marque mal
évaluée risque d'être rejetée par son entourage, d'autant plus que, dans une
communication interpersonnelle, le poids accordé aux éléments défavorables est
amplifié par le receveur (Holmes et
Lett, 1977 ; Mizerski, 1982). Il est donc tentant de bâtir un plan média ayant
pour cible de communication les leaders d'opinion.
Mais la construction d'un tel plan suppose qu'il soit possible d'identifier les médias et les supports prioritaires des leaders, et que ceux-ci soient notoirement différents de ceux retenus par les non-leaders. Or selon Engel, Blackwell et Miniard, (1995, p. 732), cela ne serait pas le cas. Cette supposition a pendant longtemps réduit considérablement l'intérêt managérial des leaders : à quoi bon identifier des leaders, s'ils lisent les mêmes supports de presse, écoutent les mêmes émissions de télévision et de radio que les non-leaders ? Même si compte tenu de l'opérationnalisation du concept, il est pratiquement impossible d'imaginer un support centré sur la seule cible des leaders (soit 10 % d'une population), il faut néanmoins vérifier que l'affinité des leaders d'opinion varie entre des supports visant le même segment. Les résultats de Vernette et Schmutz (2002) montrent qu'il est possible de concevoir de tels plans médias pour la presse magazine, car les indices d'affinité des différents titres diffèrent significativement.
Ainsi, pour des produits liés à l'apparence de la femme (beauté,
maquillage, mode et accessoires) l’audience utile des magazines féminins
varient selon les cibles leaders. On a reporté dans la figure 6 les taux
d'audience des magazines féminins sur chacune de ces cibles (ie. % des lecteurs
du magazine qui sont leaders dans l'une des catégories de produit) : ils sont
tous significativement supérieurs au pourcentage de leaders femmes dans la
population française. Par exemple, alors que dans la population française 20,9
% de femmes sont leaders d'opinion pour la catégorie de produit "Beauté,
parfums", 48,1 % des lectrices du magazine Jeune et Jolie sont des
leaders dans cette catégorie.
Au sein du groupe, les avis du leader
seraient privilégiés et imités par son entourage, car ils représentent une
adhésion aux normes du groupe (Stafford, 1966). Le développement des groupes
« on line » (listes de diffusion, chat, forum…) sur le réseau
Web permet la création de véritables communautés virtuelles (Wellman et
Guilia, 1996 ; Brodin, 2000) ; certains leur confèrent un pouvoir tribal,
notamment pour la formation des images de marques au sein du groupe (Kozinets,
1999 ; Cova et Carriere, 2002). L’observation de ces groupes virtuels
montre que certains individus interviennent plus fréquemment et plus
durablement que d’autres échangent avec un plus grand nombre
d’internautes : ils sont les « moteurs » qui influencent le
reste du groupe, statut très proche du leader d’opinion classique.
A. La présence de communautés.
La multiplication des communautés, professionnelles ou non, joue
également un rôle non négligeable pour la propagation d’informations, surtout
lorsqu’elles sont spécialisées. Dans le monde réel, si un passionné de culture
tibétaine est averti de la sortie d’un livre particulièrement intéressant sur
le sujet, il n’aura peut être pas l’occasion d’en faire part à des personnes
potentiellement intéressées. Sur Internet par contre, il y a de grande chance
qu’il puisse avertir d’autres personnes partageant sa passion. Le développement
des communautés spécialisées dans les avis de consommateur jour un rôle
accélérateur dans la diffusion des défauts des produits ou services.
En réalité, le Web rapproche des personnes qui, dans
d’autres conditions, auraient été normalement séparées.
B. Marketing viral « exponentiel ».
Certains font la distinction entre le marketing viral « classique » et le marketing viral « exponentiel », ce dernier étant lié aux sites de communautés, comme Theglobe.com. Libération, dans un article consacré au sujet, cite un spécialiste du Net, Raphaël Richard, pour qui « il y a deux sortes de marketing viral ». Le premier fonctionne sur un mode linéaire. Vous créez sur le Web une communauté fascinée comme vous par un sujet et ses membres recrutent à leur tour de nouveaux abonnés. Mais la progression se fait sur un mode tranquille. Beaucoup plus juteux est le marketing viral de type exponentiel […], un ensemble de techniques visant à créer à l’infini des communautés. En l’espace de quelques mois, e-Groups a drainé vers son site sept millions d’internautes regroupés dans 240 000 communautés : fans de club de foot, amateurs de saxophone… »
C. Caractéristiques des communautés.
a) Communautés ouvertes ou fermées.
Les
communautés fermées se caractérisent par des frontières claires, des membres
durables et peu de liens avec les autres communautés. Les communautés ouvertes
sont plus fluides, elles autorisent une participation nomade, des contacts
directs et s’ouvrent même à des produits ou entreprises concurrents. Les
communautés d’aujourd’hui, en particulier dans le cyberespace, sont des
communautés ouvertes.
b) Groupes de liens communs et d’identité commune.
Les
groupes bâtis sur des liens communs sont des groupes pour lesquels
l’identification et l’attachement aux membres du groupe sont forts. Les groupes
fondés sur l’identité commune sont des groupes où l’on rencontre un attachement
à la communauté plus fort que l’attachement aux autres. Cette distinction n’est
pas utilisée dans les études sur les communautés virtuelles.
c) Les communautés virtuelles de consommateurs et les communautés créées par les entreprises.
Si ces communautés peuvent être ouvertes ou fermées, les entreprises ont souvent créé des communautés virtuelles d’identité plutôt que des communautés basées sur les liens entre membres, ce qui reste une voie à explorer. Dans les communautés de consommation face à face basées sur la marque, la faible participation aux événements ou activités du groupe n’empêche pas l’existence de sentiments communautaires. Ils sont même plus forts dans une communauté créée par des consommateurs. La durée de l’expérience partagée (longueur) le nombre de facettes de l’existence partagées (largeur) et l’intimité du partage (profondeur) sont trois facteurs qui peuvent intervenir également pour expliquer leur intensité.
Reconnaître la diversité des communautés virtuelles amène nécessairement à mettre en place des approches adaptées à leur type et mode relationnel.
D. Exemple de création d’une communauté virtuelle : Le cas « New Balance »
La marque de chaussure de sport
" New Balance " est encore peu présente en France où la concurrence
est rude. Pour se démarquer, elle a donc pris une orientation marketing
différente des géants Nike, Adidas et Reebok.
La course à pied est un sport très individuel et étant donné qu’il n’y a ni club ni fédération, il est d’autant plus difficile pour les sportifs de se rencontrer. " Néanmoins, les runners ont besoin d’être reconnus parmi leurs pairs, ce qui se fait d’ailleurs très naturellement sur les grandes courses ", indique Henriette Lopy, responsable marketing de " New Balance " en France.
C’est de ce constat que " New Balance " a décidé de créer le Running Club", une communauté on-line où tous les passionnés de course pourront échanger leurs connaissances en la matière, se rencontrer et passer des petites annonces.
New Balance a adopté une stratégie de Customer Evangelism qui récompense avec des points les membres les plus actifs pour qu’ils deviennent une force de vente indirecte. Ces points leurs donnent accès à certains privilèges : dossiers spécialisés, forums de discussion avec des experts, dossards préférentiels gratuits, vestiaires V.I.P. sur les courses, équipement offert, …
Cette stratégie s’appuie sur un constat simple : la promotion des services ou produits d’une entreprise par des consommateurs convaincus est beaucoup plus crédible qu’à travers un réseau de vente. Ceci nécessite de construire une image positive et une relation presque personnelle avec ses clients. Malgré cela, le coût par nouveau client est souvent beaucoup plus bas qu’à travers des campagnes de communication classiques.
• L’avantage du buzz. La
visibilité d’un site provient aussi de sa réputation parmi les internautes,
parfois favorisée par la presse générale ou spécialisée, qui reprend les
événements ayant reçu une attention particulière sur le Web. Dans l’exemple du
lancement du site satirique Kasskooye.com, qui moque les pratiques des jeunes
entrepreneurs branchés de l’Internet, la presse est venue massivement couvrir
l’événement, une semaine après le lancement du site, parce qu’elle avait eu
vent du buzz autour de Kasskooye. Comment se crée le buzz, l’attention portée
au site ? Le phénomène peut être spontané mais l’emploi adéquat de tactiques
virales peut grandement amplifier le mouvement.
Comme le note justement
Jeffrey Rayport, professeur à la Harvard Business School, le marketing viral
est d’ailleurs l’occasion d’exploiter la force des « liens faibles » (weak
ties) : « Les sociologues ont noté que les individus qui bénéficiaient de
nombreux liens sociaux informels avaient plus d’influence sur les communautés
que les individus qui disposaient de liens moins nombreux mais plus solides.
L’industrie cinématographique s’appuie
aujourd’hui sur des équipes spécialisées qui interviennent dans les forums pour
lancer des informations sur les films avant leur sortie. Une fois reprises, ces
informations peuvent connaître une diffusion exponentielle si leur transmission
est correctement gérée. Le marketing viral comme instrument de promotion est
pris très au sérieux au sein de l’industrie cinématographique américaine même
si David Ansen et Corie Brown écrivent avec humour : « Hollywood peut
comprendre les leçons à tirer d’un phénomène comme Titanic, le film le plus
cher jamais réalisé : dépensez plus d’argent ! Mais ça [Blair Witch] ? Ne
dépensez rien, ne faites pas de publicité à la télévision avant la sortie,
n’engagez aucun acteur connu, montrez votre film dans quelques salles d’art et
d’essai, dites dix “je vous salue Marie” et attendez que la foudre frappe !… ».
Pour Tony Perkins, rédacteur en chef de Red Herring, le problème se pose plus
brutalement : « De notre point de vue, 1999 est la première année où Internet a
cogné Hollywood en pleine face. ».
Avant Blair Witch, ce lien entre Internet et le cinéma
n’avait encore jamais vraiment été développé alors même qu’on estime qu’aux
Etats-Unis la moitié de la population qui fréquente régulièrement les salles
(un film par mois ou plus) est connectée à Internet. « Créer un site Internet
est désormais une partie nécessaire de la stratégie marketing d’un film, dit
Ken Goldman, senior vice-président de Disney Online, les jeunes l’attendent et
les producteurs exigent maintenant qu’un budget de marketing sur Internet soit
inclus dans le contrat (Perkins, op. cit) ».
La France se met aussi au marketing viral. Pour
la sortie du site du film d’Edouard Bear, La Bostella, un « site teasing »
visant à créer un buzz a été lancé. Ce faux site personnel intitulé
Lamaisonquelouefrancis.com met en scène un personnage du film, Francis. Le film
se passe en partie dans la maison de Francis et le site montre donc ce dernier
cherchant à louer sa demeure provençale à des gens qui ont de « bons concepts »
demeure qui finira par revenir à la troupe de Bear. En attendant, le site est
destiné à créer un mystère et une attente avant le lancement d’un compte à
rebours. Il s’agit d’un moyen de campagne propre à Internet qui peut se
permettre de se positionner avant le site du film lui-même et qui permet
d’assurer de la visibilité à ce dernier dès sa mise en ligne.
b) Un cas incontournable : le Projet Blair Witch.
• Le
contexte :
The Blair Witch Project est un faux
documentaire qui met en scène trois étudiants à la recherche des traces d’une
sorcière, légende locale de Burkittsville, Maryland. Ils s’enfoncent dans les
bois et on perd leur trace. Par contre, on a retrouvé leur film qui devient le
film projeté. Le film a été produit par ses deux réalisateurs, Eduardo Sanchez
et Daniel Myrick, totalement inconnus à l’époque. Les conditions particulières
du tournage ont été très remarquées : les réalisateurs ont lâché les acteurs
dans la nature, communiquant avec eux à distance et ne leur donnant qu’un
nombre minimal d’instructions, afin de développer chez eux une peur véritable…
Le reste de l’histoire est connu : des mois de buzz avant la sortie du film,
entièrement généré par bouche-à-oreille sur le réseau. Le site Blairwitch.com a
obtenu jusqu’à trois millions de hits par jour et un succès phénoménal par
rapport aux coûts engagés : 65 000 dollars de coût de réalisation, 1,5 million
pour la distribution et la promotion, et 140 millions de recettes au box-office
durant l’été 1999, ce qui en fait l’un des films les plus rentables jamais
réalisés, créant une belle panique parmi les majors hollywoodiens.
• Les
raisons du succès :
Projeté en janvier 1999 au festival du film
indépendant de Sundance, le film est repris par Artisan Entertainement, une
petite société de distribution. C’est le directeur du marketing d’Artisan qui,
faute d’avoir un budget publicitaire suffisant, a l’idée de reprendre le site
Internet du film créé par les deux cinéastes, qui avait déjà permis de faire un
peu parler du film (des fan clubs avaient été créés dès décembre 1998). Artisan
enrichit le contenu du site en rajoutant des extraits du journal de l’un des
personnages, des rapports de police bidons et même l’interview de parents en
deuil de leurs enfants disparus. Comme le dit John Hegeman, le responsable
marketing d’Artisan, « nous voulions faire du site une sorte de programme
hebdomadaire avec de nouvelles informations chaque semaine ».
Du point de vue de John Leland de Newsweek, « leur budget
limité les a forcés à changer le plan marketing habituel à Hollywood. Au lieu
de s’adresser aux masses passives, les promoteurs du film ont ciblé la
communauté réduite mais influente qui s’intéresse à la sorcellerie sur Internet
». Le résultat a contribué à créer une confusion entre le réel et la fiction et
l’équipe du film a vite réalisé que cette confusion était leur meilleur atout.
Comme le dit un des premiers fans : « J’ai cru au début que l’histoire était
réelle et c’est ce qui m’a attiré. Quand j’ai appris que c’était une fiction,
je me suis dit que les auteurs étaient géniaux. Et je voulais que tout le monde
tombe dans le piège comme moi. » Ce sont les fans qui ont développé le réseau
de liens menant au site de Blair Witch à partir d’autres sites de film, de
sites sur les sciences occultes…
Par ailleurs, la politique marketing menée
dépasse parfois l’Internet pour quelques coups d’éclats en direction des campus
: exposition itinérante des « objets retrouvés », distribution d’autocollants à
l’effigie des trois acteurs recherchés… Pour finir, Artisan conclut un accord
avec la chaîne de Science Fiction (The Sci Fi Channel) en finançant
conjointement Curse of the Blair Witch, un faux documentaire muet créé par les
deux réalisateurs, à partir de leurs rushs de repérages. Diffusé à la veille de
la sortie, ce film a battu tous les records d’audience de la chaîne.
Le
phénomène a été encore amplifié par une sortie délibérément limitée : 27 cinémas
seulement en première semaine, dans les grandes villes
uniquement, ce qui a provoqué d’énormes queues, avant de passer à 800 salles en
deuxième semaine et 1 100 en troisième, forçant les majors à réviser leur
calendrier de sorties pour ne pas souffrir de ce succès inédit.
Pourtant, la réaction du public est ambiguë : certains
aiment, mais beaucoup hurlent au coup monté, dénonçant justement le film comme
un pur produit marketing. Certes, le sujet convenait parfaitement aux attentes
des habitués d’Internet, qui ont pu disserter sur la valeur magique des objets
rituels du film… Il y a aussi beaucoup de spéculations sur les phénomènes
paranormaux sur le réseau, dont de nombreux sites voudraient prouver la
réalité. Cette confusion entre réalité et spéculation est d’ailleurs l’une des
caractéristiques d’Internet, où le manque de contrôle de l’information
correspond à une forme de démocratie décentralisée, contestataire et contre la
parole officielle (propriétés d’ailleurs partagées avec la rumeur) qui pose parfois
le problème de la désinformation.
• Les
principales leçons :
L’identification d’une « communauté porteuse »
du processus viral est le point fondamental à retenir ici.
Elle passe par :
En effet, les campagnes de marketing viral ne sont pas toujours une réussite. Cela peut être à l’encontre de l’entreprise, voire parfois même à l’encontre de l’internaute lui-même.
a) Des experts en marketing s’achètent les services de jeunes blogueurs américains.
À première vue, Sean Boone est un
"blogueur" parmi tant d’autres. Un lycéen de 17 ans, qui vit dans
l’Idaho et raconte sa vie sur son site perso : ses virées avec ses
copains, concerts de rock et exploits athlétiques... sous la forme d’un Web log
(blog, en abrégé ou journal de bord, en français : éditées avec des outils
simples comme Blogger, ces "pages persos" sont réalisées par des
internautes qui souhaitent s’exprimer en ligne sans se confronter aux problèmes
techniques).
Mais comme cinq autres jeunes de 17
à 24 ans, Sean a été recruté en février par une agence de marketing de Dallas,
Richards Interactive. Sa mission : recommander de temps en temps à ses
lecteurs une nouvelle boisson à base de lait, Raging Cow, vendue par
Dr. Pepper/Seven Up. Le plus naturellement possible. Et sans indiquer le
chèque-cadeau de 300 $ et les produits gratuits reçus en échange.
Cette nouvelle stratégie de marketing n’est pas du goût de tous. Dès la parution dans le magazine Newsweek d’un court article consacré à la question, début mars, blogs et forums de discussion se sont vite emplis de commentaires rageurs. "Si les blogueurs se laissent acheter, ils perdent toute crédibilité” , s’indigne par exemple un internaute. Un site britannique est allé jusqu’à organiser un boycott en ligne de la campagne Raging Cow.
Car les blogs sont par définition
des espaces de libre expression, exempts de toute ambition commerciale. Tout au
plus y voit-on quelques liens publicitaires clairement identifiés comme tels et
servant à financer l’hébergement du site.
Beaucoup estiment que ces tentatives de commercialisation
sont vouées à l’échec. "Avec de
nombreux membres et lecteurs prompts à détecter toute manipulation, la
blogosphère résistera probablement à de tels efforts, prédit Glenn
Reynolds, auteur d’un des blogs les plus lus aux Etats-Unis. Ceux qui participent à ce type de campagne
seront probablement la risée des autres blogueurs."
Sean reconnaît avoir reçu beaucoup d’e-mails de protestation. "Mais, ce sont les bloggueurs plus âgés, de 30 ans et plus, qui ont mal réagi, ajoute-t-il. En général, les jeunes et les ados n’y voient aucun problème." Et les 18-24 ans constituent justement le coeur de cible.
La boisson au nom de vache a été lancée sur six marchés-tests aux États-Unis. Un lancement soutenu par des publicités sur le Web, à la radio et par des séances de dégustations. Difficile à ce stade d’évaluer l’impact des blogs. Mais d’après Todd Copilevitz, directeur de l’agence Richards Interactive, les six jeunes recrues "semblent avoir amené un nombre important de visiteurs au site ragingcow.com" (site publicitaire rédigé lui aussi sous forme de blog, soi-disant tenu par une vache ?).
"Les blogs intéressent beaucoup les professionnels du marketing, poursuit
Todd Copilevitz. Car ils permettent
d’observer les goûts et les habitudes des jeunes. Et peut-être aussi de
s’adresser à une tranche d’âge souvent peu perméable aux campagnes
publicitaires traditionnelles.
Les six blogueurs recrutés ont été sélectionnés en raison de la popularité de leur site auprès de leur groupe d’âge. En cela, la campagne relève du "marketing viral" : l’objectif est d’allier le bouche-à-oreille traditionnel au pouvoir de diffusion des nouvelles technologies. Une tactique beaucoup moins coûteuse que le passage par des supports publicitaires traditionnels, mais plus risquée, car le message transmis peut facilement déraper.
La campagne est également un exemple de ce qu’on nomme "stealth" ou "undercover marketing" : un marketing "furtif", "sournois", ou comment faire de la publicité sans le dire.
En attendant, la controverse ne fait
peut-être qu’accroître la notoriété de la boisson en question. Et Sean, qui
espère travailler plus tard dans la publicité, n’hésite pas à déclarer : "Ça fera très bien sur mon CV, d’avoir
participé à une campagne de marketing d’un tout nouveau genre."
L'histoire commençait bien et
semblait palpitante : Transatlantys, un énorme chantier de 11 ans débutant en
juin devait nous permettre de rallier Paris à New York en passant sous l'océan
en seulement 8h de train !
TransAtlantys
est en fait un canular - hoax - orchestré par SNCF pour un nouveau service de
billets d'avions et de séjours.
Une
confirmation peut-être apporté par les faits suivants :
o Le nom de domaine TransAtlantys.fr appartient au site voyages-sncf.com de la SNCF ;
o Le site piège transatlantys.com appartient lui à l'agence DDB, une agence de communication ;
o Depuis peu sur transatlantys.com, l'accès aux différentes parties du site est bloqué par une publicité de voyages-sncf.com proposant la vente de billets d'avions, de séjours ...
Cette opération de marketing viral, en dupant les internautes, permet de générer un trafic conséquent pour faire découvrir aux personnes piégées les nouveaux services de la SNCF. Une arme à double tranchant car certaines personnes ne vont pas apprécier pour sûr d'avoir été piégées de la sorte...
c) Lycos ou l’échec de la stratégie du spam anti-spam.
La société Lycos a décidé de partir en guerre contre les spammers mercredi 1er octobre en déployant une stratégie virale innovante mais un peu trop frontale : Make love not spam !
Imaginez tous les internautes qui
s’unissent pour contrer les spammeurs... L’idée apparemment simple et
sympathique consistait pour les internautes à télécharger un économiseur
d’écran qui envoie des requêtes vers les serveurs des spammeurs. Plus le nombre
de "screensavers" installés est grand, plus les serveurs devaient
être saturés, voire bloqués, rappelant le "denial of service", une
tactique (illégale) utilisée par certains "hackers" pour saturer un
site jusqu’à la panne.
Le bouche-à-oreille ayant marché à
plein, ce sont plusieurs centaines de milliers d’économiseurs d’écrans qui ont
été installés en quelques jours.
Il n’en fallait pas plus pour que,
touchés directement au porte-monnaie, les spammeurs contre attaquent...
Quelques réglages techniques et les requêtes envoyées à leur encontre ont été
redirigé vers... le propre site de Lycos qui d’arroseur est devenu arrosé...
Quelques jours après c’est même une
nouvelle version du screensaver qui a fait son apparition, contenant un
"cheval de Troie"...
Le 6 décembre Lycos décidait de
suspendre son action...
Bien qu’ayant le mérite de d’attirer l’attention sur le problème du spam, cette action montre qu’une campagne virale doit être conçue avec un très grand soin pour éviter des effets de bord qui peuvent être particulièrement dévastateurs pour une marque...
Dans la société de consommation
actuelle, le consommateur a conscience des messages publicitaires. Assommé par
les promesses des marques, il a perdu confiance en elles. Les connaissances
sont donc les meilleurs conseillers pour le choix d’un produit ou d’un service.
Le bouche-à-oreille devient ainsi un puissant outil de communication. Utilisé
par les professionnels du marketing, cet outil est appelé marketing viral. Lié
à la vitesse de propagation des messages sur la Toile et aux NTIC, le marketing
viral est un moyen de communication révolutionnaire.
La publicité traditionnelle a de plus
en plus de difficultés à toucher les
consommateurs (surtout les moins de 35 ans qui délaissent de plus en
plus les médias traditionnels au profit principalement Internet). Les
annonceurs recherchent donc de nouveaux moyens pour entrer en contact avec
cette cible très importante (les 15-34 ans) dans le succès ou l’échec
d’un produit.
Depuis le début de l’année 2005, les agences de communication semblent proposer de plus en plus souvent le marketing viral (à base de vidéos). C’est très tendance, normalement pas très cher et hyper efficace (en théorie).
Pour que l’effet viral, c’est-à-dire la propagation d’individu à individu, fonctionne, il faut l’effet « WAHOO » … que nous trouvons souvent dans les vidéos anglophones.
Ces vidéos sont souvent politiquement
incorrectes, crues ou saignantes, sexy…
Celles qui circulent sont le plus souvent celles où l’annonceur a
accepté de prendre un véritable risque
et de jouer avec son image (les deux vidéos pour sport Ka de Ford –l’oiseau éjecté du capot
avant et le chat décapité - ont été les
vidéos les plus recherchées en 2004 au Royaume-Uni).
L’autre facteur de propagation est le degré d’affinité entre une marque et ses consommateurs - utilisateurs.
Les fans d’Apple sont particulièrement enclins à parler de la marque et à propager toutes les informations la concernant. C’est aussi vrai dans le cas de la « communauté » d’utilisateurs de firefox.
Mais
toutes les marques n’ont pas la chance d’avoir le soutien d’une véritable
communauté online prête à relayer ses informations par le biais des mails ou
des blogs. Et tous les annonceurs ne peuvent pas prendre de risques en terme
d’image et accepter des campagnes véritablement décalées… Sachant
qu’aujourd’hui, les internautes
étant en quelque sorte « immunisés », il faut aller de plus en plus loin avec
des campagnes de plus en plus fortes, pour que le « virus » se propage.
C’est pourquoi je pense que les
internautes se lasseront très vite des campagnes basées sur des vidéos qui, au
mieux, peuvent être considérées comme de bonnes publicités au pire comme de
très mauvaises !
Ceci ne veut pas dire qu’il faut
déjà enterrer le marketing viral mais qu’il faut avoir conscience de ses
spécificités et accepter les règles du jeu.
On peut penser à une utilisation
progressive du Buzz Marketing au service du Luxe. Le luxe est en train de subir
une mutation grave, il est menace de disparition.La célébration de l’unicité
est en train de crever, les grands couturiers passent de moins en moins par les
grands artisans et préfèrent travailler avec les ateliers indous ou chinois.
L’industrie du luxe a un grand besoin de retrouver son essence d’exclusivité,
et je pense que le Buzz Marketing peut l’aider dans cela.
Alors… Le marketing viral nous entraîne–t-il vers la fin
du mass média ?
Vernette E.
(2002), Le rôle et le profil des leadres d’opinion pour la diffusion de
l’Internet, Décisions Marketing N°25
Janvier-Mars, 37-51
Boulaire C. et Balloffet P. (1999), Freins et motivations à l’utilisation d’Internet : une exploration par le biais des métaphores, Recherche et Applications en Marketing, 14, 1, 21-40.
Collins
B., Hawks J. et Davis R. (2000) From Theory to Practice: Identifying Authentic
Opinion Leaders to Prove Care, Managed
Care, july, 56-62.
Herr
P. M., Kardes F.R. et Kim J. (1991) Effects ofWord-of-Mouth and Product
Attribute Information on Persuasion : An Accessibility Diagnostic Perspective, Journal of Consumer
Research, 17, march, 454-462.
Sempé L. (2000) Une analyse de mesure de l’appartenance aux cercles sociaux : une analyse factorielle multiniveaux, Recherche et Applications en Marketing, 15, 2, 43-58.
Vernette E. et Schmutz B. (2000) Les influenceurs : une cible média stratégique pour la communication, Séminaire Média de l’IREP, Paris, décembre, 29 p.
Ben MiledH. et Le Louarn P. (1994) Analyse comparative de deux échelles demesure du leadership d’opinion : validité et interprétation, Recherche et Applications en Marketing, 9, 4, 23-51.
Vernette E. (2003), Les nouvelles perspectives du concept de leader d’opinion en marketing : fondements, apports et pistes de recherche, Actes du Congrès International de l’AFM 2003.
Brodin O. (2000), Les communautés virtuelles : Un
potentiel encore peu exploré. Décisions
Marketing N°21 Septembre-Décembre, 47-56